Sport et résilience : rebondir après un traumatisme
Cet article retranscrit une interview que j’ai donné à monstaffmedical.com, plateforme spécialisée dans la santé des sportifs : https://www.monstaffmedical.com/blog/624453e36dee6077c3356467/la-resilience-chez-le-sportif-quelle-prise-en-charge-aurelie-rayet
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Journaliste : « Pouvez-vous nous donner votre définition de la résilience ? »
A.R : « Il s’agit littéralement de la « Capacité à rebondir après un traumatisme, qu’il soit physique ou psychologique. » La résilience est la capacité à faire face aux adversités de la vie, à transformer la douleur en force motrice pour se surpasser. Une personne résiliente, comprend qu’elle est l’architecte de son propre destin. Pour résumer, nous pourrions dire qu’il s’agit de transformer une blessure en ressource. »
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Journaliste : « Selon vous, la résilience est innée ou acquise ? »
A.R : « Nous sommes programmés pour survivre. Lorsque nous sommes confrontés à une difficulté, nous allons naturellement chercher à nous battre. Nous pourrions parler d’une forme « d’urgence à vivre », présente en chacun de nous. Il y a donc une part d’inné dans la résilience (défense naturelle). Cependant, celle-ci est également la résultante d’acquis progressifs relatifs à différents évènements, à son éducation, etc. C’est là qu’intervient la nécessité thérapeutique. Un professionnel (psychologue, coach, préparateur mental…) peut aider au développement de la résilience. En tant qu’être humain, chacun a des dysfonctionnements prenant racines dans son histoire de vie. Ces derniers peuvent être identifiées grâce à un travail sur soi, dans le but de les gérer ou de les réduire. »
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Journaliste : « Pourriez-vous citer quelques exemples de personnes résilientes ? »
A.R : « Je pourrais citer Francis Ngannou, cet ancien SDF devenu Champion Du Monde de MMA ou encore Alexis Hanquinquant, amputé de la jambe droite suite à un accident de chantier, devenu triple champion du monde de paratriathlon. Mais il y a aussi plein de résilients silencieux autour de nous : celui qui a survécu à une grave maladie, un enfant maltraité qui devient un adulte bienveillant et engagé au service des autres… Quelque part, nous sommes tous des résilients ayant survécu à nos propres guerres. »
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Journaliste : « Et dans votre pratique ? »
A.R : « Dans ma pratique en tant que préparatrice mentale, je pourrais évoquer un sportif avec un handicap physique, que j’accompagne en athlétisme. Cet athlète a une volonté de se prouver des choses qui est décuplée. Nous travaillons à rester vigilant afin de ne pas tomber dans l’effort extrême et la contre-performance. Comme l’indique la loi d’Illich : « Au-delà d’un certain seuil, l’efficacité humaine décroît, voire devient négative ». En effet, le repos peut contribuer à de meilleures performances … que le mouvement ! (cf. risque de blessure, de charge mentale, de dépression, de burn out, d’émotions exacerbées, etc.).
J’accompagne également une tenniswoman ayant subi des violences dans son passé. C’est aujourd’hui une sportive accomplie et engagée. Elle a su s’appuyer sur ses expériences négatives pour performer et mettre du sens dans sa vie. Nous avons beaucoup travaillé sur cette bascule émotionnelle : passer du sentiment d’injustice, d’une colère néfaste ; à un engagement fort, moteur et positif. »
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Journaliste : « Concrètement, quelle est votre méthode ? »
A.R : « Plusieurs étapes :
- Extérioriser les expériences traumatiques ou difficiles. Passer du déni à l’acceptation.
- Comprendre que le trauma ne fait pas parti de l’identité de la personne. S’alléger de ce poids.
- S’appuyer sur ses talents, ses dons naturels, ses potentialités. En bref, focaliser sur le meilleur de soi. Cela permet de générer de la confiance.
- Utiliser la souffrance comme force motrice pour quelque chose de positif. Ici c’est l’étape de la création. On pourrait parler d’effet de levier, de transfert d’énergie.
L’indicateur d’un accompagnement réussi : avoir donné un sens à la souffrance vécue, et poursuivre le cheminement, l’engagement, de façon saine et équilibrée. »
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Journaliste : « Quel axe de travail revient le plus avec les sportifs ? »
A.R : « La recherche d’équilibre justement. La nécessité de lâcher prise. Les personnes qui ont vécu des évènements difficiles ou traumatiques ont une forme de revanche à prendre. Cela peut pousser à une sur-implication et donc un épuisement prématuré. Nous travaillons donc beaucoup sur la gestion du stress et sur les émotions. Cela est vrai au niveau corporel (techniques de respiration, techniques de relaxation, routines et niveau d’énergie) ainsi qu’au niveau mental (régulation émotionnelle, méditation, visualisation). »
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Journaliste : « Pourriez-vous donner un exemple d’exercice concret ? »
A.R : « La cohérence cardiaque et « la règle du 365 » est la plus rapide et la plus simple. La position assise avec le dos droit est recommandée car la cohérence cardiaque ne fonctionne pas bien en position couchée.
➔ 3 fois par jour (matin, midi et soir) – les effets bénéfiques de la pratique ne persistent que quelques heures (environ 4h)
➔ 6 respirations complètes par minute : 5 secondes à l’inspiration et 5 secondes à l’expiration (inspi. abdominale par le nez / expi. par la bouche)
➔ Pendant 5 minutes minimum »
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Journaliste : « Finalement, est-ce que la souffrance est obligatoire pour performer ? »
A.R : « Non. Il est tout à fait possible de performer sans avoir vécu de traumatisme. Cependant, je dirais qu’une forme de « colère » est indispensable. Elle peut être issue d’un évènement traumatique mais aussi d’un fort engagement pour une cause qui vous est chère.
Le courant de la croissance post-traumatique évoque le fait qu’un traumatisme pourrait, à terme, représenter une chance en nous rendant plus humain, plus attentif, plus résistant. La confrontation avec la souffrance pourrait nous rendre plus résistant à la condition qu’un travail sur soi soit entrepris. En effet, le risque du déni serait de contre-performer et surtout de souffrir en silence. »
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Journaliste : « Quel message voudriez-vous faire passer ? »
A.R : « La souffrance est inévitable, c’est un fait. Cependant, il faut retenir que nous avons tous un degré de liberté face à celle-ci. En effet, nous ne sommes pas totalement soumis aux événements douloureux, nous avons un pouvoir d’action. Nos conditions initiales – si difficiles soient-elles – ne sont pas une fatalité. La résilience est possible pour tous ceux qui ont l’audace de faire les efforts nécessaires pour casser leurs schémas de pensée limitants. Comme le disait Martin Luther King : « Si tu ne peux pas voler, alors cours. Si tu ne peux pas courir, alors marche. Si tu ne peux pas marcher, alors rampe, mais quoi que tu fasses, tu dois continuer à avancer. »
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Article rédigé par Aurélie Rayet – Préparatrice mentale ©